Diotima.
Le Tonnerre : Parfait Esprit (CG VI.2:13,1-21,32)
Le Tonnerre n’existe qu’en sa version copte trouvée à Nag Hammadi. L’auteur, la date et le lieu de sa composition nous sont inconnus. Toutefois, les spécialistes proposent comme période plausible le deuxième ou le troisième siècle et le lieu Alexandrie.
Le discours en est une révélation faite par une divinité féminine qui parle alternativement à la première et à la deuxième personne. Le texte se présente sous la forme d’un hymne et la structure antagonistique ainsi que l’utilisation de paradoxes renforcent encore cette interprétation. Assurément gnostique, il développe le mystère de la Divinité inconnue et la relation entre elle et ceux à qui Elle s’adresse. Le Tonnerre fixe l’attention sur la relation entre ceux qui écoutent et la divinité au travers des proclamations faites à la première et à la deuxième personne et il fait appel aux capacités intellectuelles et cognitives de ceux à qui la Divinité s’adresse.
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J’ai été envoyée par la Puissance.
Et je suis venue à ceux qui pensent à moi.
Et j’ai été trouvée parmi ceux qui me cherchent.
Regardez-moi, vous qui pensez à moi.
Et vous ceux qui écoutez, écoutez !
Vous qui m’attendez, menez-moi à vous.
Et ne me poursuivez pas de vos visions.
Et que vos paroles ne me haïssent point, ni votre écoute.
Ne soyez pas ignorant de moi, en aucun lieu, en aucun temps.
Soyez sur vos gardes !
Ne soyez pas ignorant de moi.
Car je suis la première et la dernière.
Je suis l’honorée et l’honnie,
Je suis la putain et la sainte.
Je suis la femme et la vierge.
Je suis la mère et la fille.
Je suis les membres de ma mère.
Je suis la stérile et celle aux nombreux enfants.
Je suis celle dont les mariages sont multiples, et je n’ai pris nul époux.
Je suis la sage-femme et celle qui ne donne pas la vie.
Je suis la consolatrice de mes douleurs.
Je suis la fiancée et la jeune mariée.
C’est mon mari qui m’a engendrée.
Je suis la mère de mon père et la soeur de mon mari.
Et il est ma progéniture.
Je suis la servante de celui qui m’a apprêtée et je suis le seigneur de ma progéniture.
Mais il est celui qui m’a engendrée avant le temps et il est ma progéniture dans le temps, et ma puissance vient de lui.
Je suis la domestique de sa puissance en sa jeunesse et il est la canne de mes vieux jours.
Et tout ce qu’il désire m’arrive.
Je suis le silence incompréhensible et la pensée omniprésente.
Je suis la voix de multiples sons et le logos de nombreuses formes.
Je suis l’articulation de mon nom.
Pourquoi, vous qui me haïssez, m’aimez-vous ?
Et haïssez-vous ceux qui m’aiment ?
Vous qui me niez, confessez-moi,
Et vous qui me confessez, niez-moi.
Vous qui dites la vérité sur moi, dites des mensonges sur moi.
Et vous qui avez dit des mensonges sur moi, dites la vérité sur moi.
Vous qui me connaissez, devenez ignorant de moi ; et puissent ceux qui étaient ignorants de moi me connaître.
Car je suis la connaissance et l’ignorance.
Je suis la honte et la pureté.
Je suis sans honte, je suis honteuse.
Je suis la force et je suis la peur.
Je suis la guerre et je suis la paix
Faites attention à moi.
Je suis l’exilée et l’exaltée.
Prenez garde à moi en ma pauvreté et en ma richesse.
Ne soyez pas arrogant quand je suis abandonnée sur terre,
Et vous me trouverez parmi ceux qui sont à venir.
Et ne me regardez pas sur le tas d’ordures et ne partez pas en me laissant abandonnée.
Et vous me trouverez dans les royaumes.
Et ne me regardez pas lorsque je suis abandonnée avec ceux qui sont en disgrâce dans des lieux les plus pauvres.
Et alors riez de moi.
Je suis miséricordieuse et cruelle,
Soyez sur vos gardes !
Ne haïssez pas mon obéissance,
Et n’aimez pas mon contrôle dans ma faiblesse.
Ne me délaissez pas,
Et ne soyez pas effrayé de ma puissance.
Je suis celle qui existe dans toutes les peurs.
Je suis celle qui est faible et je suis à l’aise dans les lieux de plaisirs.
Je suis folle et je suis sage.
Pourquoi m’avez-vous haïe en vos conseils ?
Est-ce parce que je suis silencieuse parmi ceux qui sont silencieux,
Et que j’apparais et parle ?
Pourquoi alors m’avez-vous haïe, vous les Grecs ?
Est-ce parce que je suis une non-Grecque parmi les non-Grecs ?
Parce que je suis la Sagesse des Grecs ?
Et la Gnose des non-Grecs ?
Je suis le jugement pour les Grecs et les non-Grecs.
Je suis celle dont l’image est multiple en Égypte.
Et celle qui n’a aucune image parmi les non-Grecs.
Je suis celle qui a été haïe partout et qui a été aimée partout.
Je suis celle appelée Vie et que vous avez appelé Mort.
Je suis celle qui est appelée Loi et que vous appelez Sans Loi.
Je suis celle que vous avez poursuivie et celle qui vous avez retenu.
Je suis celle que vous avez éparpillée et celle que vous avez rassemblée.
Devant moi vous avez été rendu honteux et avec moi vous avez été libéré de la honte.
Je suis celle qui n’observe aucune fête et celle dont les fêtes sont nombreuses.
Moi, je suis sans dieu et je suis celle dont le Dieu est multiple.
Je suis sans connaissance et de moi ils apprennent.
Je suis celle qui vous avez ignoré et celle à laquelle vous pensez.
Je suis celle dont vous vous êtes cachés et celle à qui vous êtes manifestés.
Mais chaque fois que vous vous cacherez, je me rendrai manifeste.
Car chaque fois que vous serez manifestés, je me cacherai de vous.
Recevez-moi en vous-même en dehors des endroits sans grâce et contrition.
Et saisissez-moi de ceux qui sont bons bien qu’en disgrâce.
Sans honte, recevez-moi en vous-mêmes sans honte.
Et sans honte et dans la honte, blâmer les membres parmi vous-mêmes.
Et venez à moi, vous qui me connaissez et connaissez mes membres.
Faites des grands parmi les moindres des créatures.
Redevenez des enfants et ne fuyez pas cela parce que c’est petit.
Et ne ramenez pas la grandeur à la petitesse,
Car la petitesse est connue à partir de la grandeur.
Pourquoi me haïssez-vous et m’honorez-vous ?
Je connais les premiers et ceux après moi me connaissent.
Je suis la gnose de mes recherches et la découverte de ceux qui me cherchent.
Et le commandement de ceux qui demandent après moi.
Et le pouvoir des pouvoirs par ma gnose des anges qui ont été envoyés par mon logos.
Et les dieux en leurs saisons par mon commandement,
Et c’est en moi qu’existent les esprits de tous les humains,
Et c’est en moi qu’existent les femmes.
Je suis celle qui est honorée et priée et celle qui est rejetée.
Je suis la paix et à cause de moi la guerre adviendra.
Et je suis une étrangère et une citoyenne.
Je suis la substance et l’absence de substance.
Ceux qui naissent de mon corps sont ignorants de moi,
Et ceux qui sont de ma substance me connaissent.
Ceux qui sont proches de moi sont ignorants de moi
Et ceux qui sont loin de moi me connaissent.
Le jour où je suis proche de vous, vous êtes loin de moi,
Et le jour où je suis loin de vous, je suis proche de vous.
Je suis l’union et la dissolution.
Je suis le lien et l’absence de lien.
Je descends et il monte à moi.
Je suis la condamnation et l’acquittement
Moi, je suis sans péché et la racine du péché est en moi.
Je suis le désir dans l’apparence et le contrôle du coeur existe en moi.
Je suis l’écoute qui est par tous et une parole inaccessible.
Je suis muette et mes paroles sont multiples.
Écoutez-moi dans la douceur et apprenez dans la dureté.
Je suis celle qui crie,
Et je suis rejetée sur la surface de la Terre.
Je prépare le pain et mon esprit qui est en lui.
Je suis la gnose de mon nom.
Je suis celle qui crie et je suis celle qui écoute.
Vous qui êtes battus,
Jugez-les avant qu’ils ne vous jugent.
Car le juge et la partialité sont en vous.
Si vous êtes condamnés par cela, qui vous acquittera ?
Ou si vous êtes acquittés par lui, qui sera capable de vous condamner ?
Car ce qui est en vous est en dehors de vous.
Et celui qui vous a modelé à l’extérieur a imprimé cela à l’intérieur de vous.
Et ce que vous voyez en dehors de vous, vous le voyez à l’intérieur de vous.
Ceci est manifeste et ceci est votre joyau.
Écoutez-moi, vous qui écoutez et soyez enseignés par les paroles, vous qui me connaissez !
Je suis l’écoute qui est acceptable en toutes choses ;
Je suis une parole qui ne peut être retenue.
Je suis le nom de la voix et la voix du nom.
Je suis le signe écrit et la manifestation de la différence.
Mais je dirai son nom.
Soyez attentif, alors, à ses paroles et à tous les signes écrits qui ont été complétés.
Faites attention vous qui écoutez et vous aussi les anges,
Et vous qui avez été envoyés,
Et vous esprits qui vous êtes relevés d’entre les morts,
Car je suis celle qui seule existe,
Et il n’y en a aucun pour me juger.
Car nombreuses sont les formes agréables qui existent en d’innombrables péchés
Et en des actes injustes et en de disgracieuses passions, et en de temporels plaisirs,
Qui sont maîtrisés jusqu’à ce qu’ils soient devenus sobres.
Et qu’ils courent vers leur lieu de repos
Et ils m’y trouveront là,
Et ils vivront et ils ne mourront plus de nouveau.
Plus sur le sujet :
Diotima, traduction française de Spartakus FreeMann, avril 2003 e.v.
Image by Johannes Plenio from Pixabay
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