La Voie du Perroquet ou Boullan et de Guaita not dead

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La Voie du Perroquet ou Boullan et de Guaita not dead par Spartakus FreeMann. 

L’ésotérisme contemporain est fille de celui du XIXe et celui qui refuse de le comprendre est condamné à en subir les effets et les influences malgré lui. De Guaita et Boullan furent vers la fin des années 1890, les symboles des deux pôles éternels de la philosophie hermétique : la lumière et la ténèbre. Attention, ici — et pour des raisons évidentes — nous éviterons de coller l’étiquette lumière-blanc-bien et ténèbre-noir-mal à l’un ou à l’autre. Si l’on considère l’opposition caractérisant les relations de ces deux personnages, l’on découvre qu’au-delà de la lutte humaine, se dégageait une lutte d’énergies concurrentes, une lutte confuse d’ailleurs, car qui peut dire que de Guaita fut un blanc manteau de bonté et Boullan un pur voile de ténèbre maléficiée. Ils furent tous deux de parfaits outils de leur propre psyché, de leurs propres fantasmes, de leurs travers… L’un, de Guaita, se voulait le défenseur d’une vision « catholique », traditionnelle et puriste de l’hermétisme alors que le second, Boullan, était perçu comme le chancre des pratiques de la voie de la main gauche. C’est ce que je nomme la « Guerre des Egos », toute aussi inutile que fausse dans l’absolu, et qui se termina d’ailleurs par la mort des deux protagonistes. Les deux s’étant auto et cross-envoutés au nom de deux visions de l’hermétisme, l’une traditionaliste et puriste issue de la bande de Guaita et l’autre rebelle et traditionalisante (c’est-à-dire cherchant la reconnaissance du milieu) représentée par Boullan.

La Voie du Perroquet ou Boullan et de Guaita not dead
La Voie du Perroquet ou Boullan et de Guaita not dead

À quoi assistons-nous aujourd’hui ? Entre deux courants dits « traditionnels » — l’ésotérisme bon-bourgeois et la sorcellerie-rebelle — se meut un courant libre, fier, libertaire et a-traditionnel — voire même anti-traditionnel — la Chaos Magick. Alors que les anciens courants n’ont pas perdu leurs caractéristiques — les sorciers et autres mages « institutionnels » cherchant toujours la reconnaissance du courant traditionnel tout en niant ses pratiques — et ses défauts, les chaoticiens cherchent une nouvelle Voie, une autre manière de pratiquer et de concevoir l’organisation du corps initiatique et de répandre les enseignements. L’hégémonie sur le « peuple » de l’ésotérisme est toujours le but des parangons de ces deux versants de l’hermétisme alors que les chaoticiens, même s’ils travaillent sur les « pouvoirs », ne cherchent qu’à vivre la vie offerte ici-bas et à pratiquer le plus librement du monde, au plus grand désespoir et à la plus grande incompréhension des tenants de la lumière et de la ténèbre ! Troisième terme dépassant les anciens clivages et les vieilles frontières sémantiques et religieuses, ce sont les nouveaux sauvages, les nouveaux gueux que l’on voudrait voir jetés dans les flammes des enfers…

Quoi qu’il en soit, nous reproduisons donc les pensées, pratiques et théories de nos pères, les améliorant ici, les réduisant là, les pervertissant parfois… Les chaoticiens ne peuvent échapper à cette règle et puisent dans les grimoires, les ordres, les sociétés occultes des temps anciens le matériel qui est la base de leur travail. Qui oserait dire que la Chaos réinvente ce qui existe depuis le premier matin du monde ? Pas les chaoticiens qui avouent les emprunts que fait leur Art au fond magicke de l’humanité : chamanisme, thélémisme, bouddhisme, magie cérémonielle, gnose… Ces emprunts sont modifiés selon la sensibilité du chaoticien en suivant toutefois les règles de l’Art qui sont dictées par la Nature et non par les hommes. Au-delà de tous les dogmes, le chaoticien change de paradigme sans perdre son essence intime, il est celui qui danse en costume cravate au sein du feu, le prêtre qui chante les hymnes païens devant une foule de zététiciens, une pute sacrée embrassant chastement la statue de la Vierge Marie, il est multiforme et multifonction, mais il reste lui.

Sans chercher le pouvoir ou la puissance, sans chercher à se forger des idoles par ses pratiques, il poursuit son évolution vers ce qui doit être… Il se peut qu’il soit dans l’erreur, mais il n’engage jamais que lui-même, sans chercher à convaincre les autres de la perfection de ses propres rituels, de ses pratiques intimes… Loin de vouloir figer en des structures institutionnelles ce qui est mouvement de vie, il fuit les ordres, même s’il lui arrive des les fréquenter, il constitue des églises et des sociétés qui ne durent qu’un temps bref, car il sait combien la vie et les choses humaines sont impermanentes. Dans la même journée, il sera franc-maçon, kabbalisera sur le Zohar et dansera nu devant une statue de Kali avant de s’endormir sur les rythmes du Dhikr.

D’un autre coté, nous avons les perroquets des temps anciens, les reproducteurs de schémas précaires humains érigés en dogmes éternels, les avaleurs de fantasmes et fantasmagories illusoires, les copistes d’un Livre devenu incompréhensible autoproclamés « Oracles des dieux », des rêveurs photocopieurs de rites oubliés et appartenant à des époques révolues… Ces Perroquets reproduisent sans aucune forme de génie personnel les rites qui furent la production de temps, de moeurs et de particularités aujourd’hui mortes. Illusionnés par leur soif de puissance, ils osent espérer reproduire les antiques rites d’Eleusis ou des dionysiaques harpies, ils prétendent forcer les dieux et déesses à leur obéir, et, dans une folle perdition de l’âme, ils osent croire que leur volonté fait exister le monde. Oubliant ainsi que tout est lié à tout et que tout est un.

L’humanité évolue, ses rites avec elle, mais les perroquets ne sachant que reproduire ne le veulent point. Ce que la vie veut mouvant et en continuel changement, ils le voudraient figé jusqu’à la fin des temps. Ils glosent longuement et ouvertement sur LEURS visions, LEURS pratiques, LEURS réussites, LEURS progressions, LEURS, LEURS, ou leurres ? Egotiquement centré sur le nombril de leur STATUT de mage, ils osent juger ce qui sort du champ d’expérience des enseignements qu’ils reçurent de leurs maîtres. Répétant bien les leçons apprises, ils se conforment aux moules, ils paradigment et dogmatisent, anathémisent ceux qui sont sur leur chemin. Loin de tout rire salvateur ils osent prendre au sérieux la dichotomique perversité de leur art, qu’ils nomment « voie de la main gauche ou de la main droite », collant les étiquettes de leurs propres travers sur les autres, ils voudraient fonder ordres, écoles, sociétés, prisons de leurs futurs élèves, reproduisant à nouveau les erreurs des temps passés, en osant espérer devenir encore plus loup, encore plus berger que ceux dont ils sont issus ! Osez seulement rire d’eux, osez seulement leur démontrer l’inanité de leurs masturbations magiques et ils vous maléficient, ils vous damnent. Osez jouer leur jeu et les excommunier par le rire et la vie et ils vous vouent une haine qui n’a d’égale que l’énormité de leur ego.

Alors, qu’au-delà des clivages idéologiques, le chaoticien trinquera avec son Frère ou sa Soeur, quelles que soient ses croyances, ses pratiques, ses rituels et le nombre de saucisses écrasées en l’honneur du dieu Spaghetti Volant. Sur l’autel chaoticien se retrouvent le gnostique, l’athée, le sorcier, le wicca, la martiniste et le franc-maçon, le bouddhiste et la chrétienne… Mais cela, bien entendu, est intolérable au sectateur de l’initiatique rigide, psychodécadent… Toujours moquer et traquer ce que l’on ne comprend pas tout en reproduisant les vieux schémas est sa devise. Non, Boullan et de Guaita ne sont pas morts, je les ai lus encore hier sur la lucarne virtuelle.

Plus sur le sujet :

La Voie du Perroquet ou Boullan et de Guaita not dead, Spartakus FreeMann, Nadir de Libertalia, janvier 2005 e.v.

Nota : ce texte avait été écrit au début des années 2 000 tandis que j’étais en conflit ouvert avec certains membres d’ordres satanistes et de courant gnostiques apostoliques (sic !). La paix a été faites avec les uns et les autres, des pardons demandés et reçus, mais l’essence de ce texte et encore plus d’actualité aujourd’hui qu’hier. Image by PublicDomainPictures from Pixabay

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