Les noms Magiques Abraxas, Abracadabra et Abrahadabra

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Les noms Magiques Abraxas, Abracadabra et Abrahadabra par Spartakus FreeMann

Nous allons parler dans les lignes qui vont suivre des mots Abraxas, Abracadabra et Abrahadabra, mots de pouvoir, l’un issu de la Kabbale probablement chrétienne, le second d’origine grecque et le dernier, moderne, issu de la tradition thélémite.

Selon Virya, on trouve dans les écrits magiques, ainsi que sur les talismans et les amulettes, des mots n’ayant parfois aucun sens apparent. Certains noms sont très connus et utilisés, d’autres beaucoup moins répandus. Ces mots magiques ne sont jamais pris à la légère et sont tous porteurs d’une signification occulte. Même le célèbre « Abracadabra », אברקאדברא, du Moyen-âge à est considéré comme un son magique : ce nom est constitué de neuf lettres et structuré par trois Aleph (début, milieu et fin) séparant les mots « baraq », ברק, « foudre » et « dabar », דבר,« parole ». Ce mot magique donne à la parole la puissance de la foudre en éblouissant une assemblée. On trouve ce nom généralement écrit en triangle et en lettres latines sur les talismans, son écriture hébraïque est la suivante :

Abraxas (αβραξας)

On ne trouve pas de traces d’Abracadabra dans les livres des mystères kabbalistiques, par contre, le Sepher Raziel fait allusion à l’Abraxas, qui est un nom dérivé d’Abracadabra. Dans sa section 37b, le Raziel remplace Abraxas par le nom « Abragag », אבראגג, en lui donnant le sens de « divin » et en nommant de cette manière le nez du corps divin. Mais il l’utilise dans sa forme normale comme nom à invoquer pour faire apparaître une lueur dans les ténèbres, de cette manière : « Yeir Abraksas », יאיר אבראכשאס, ce qui veut dire « Il éclaire divinement ».

Les noms magiques sont obtenus par des associations, des dénaturations, des abréviations ou des combinaisons, selon des règles établies (voir la Kabbale Extatique, chap. 8). Dans les écrits de Tertullien et de Saint Jérôme, on apprend que Basilide appelait le Dieu Suprême de son système gnostique du nom d’Abraxas, marquant, ajoutent-ils, par ce mot les trois cens soixante-cinq jours de l’année solaire, car la somme de la valeur numérale des lettres de ce nom – A vaut 1. β 2. ρ 100. α 1. σ 200. α 1. ξ 60 – vaut 365. Notons qu’en outre ce mot est constitué de 7 lettres qui renvoient aux 7 jours de la semaine, mais aussi aux 7 planètes connues alors.

En septembre 1615, Godfrid Wendelin développé sa propre hypothèse sur ce terme sur ce mot dans une lettre écrite à Jean Chifflet (1). Il y prétend qu’Abrasax (ou Abraxas) est composé des lettres initiales de plusieurs mots ; chaque lettre exprimant un mot : les quatre premières, quatre mots hébreux ; les trois dernières, trois mots grecs :

A : Ab, אב, le père.

B : Ben, בן, le fils.

R : Rouach, רוח, l’esprit.

A : Acadosch, הקדש, le Saint.

S : Soteria, le salut.

A : Apo, par.

X : Xulou, le bois.

Une manière bien commode, en somme, de justifier les vérités religieuses de l’époque puisque ce mot devient alors un symbole du Christianisme par la présence à la fois de l’Ancien Testament – exprimé par les termes hébreux – et de la Trinité (le Père, le Fils et le Saint Esprit) – exprimée par les 3 premières lettres ; et du Nouveau Testament par les 3 lettres exprimant la Passion du Christ sur la Croix. Une théorie différente pose que les quatre dernières lettres A, S, A, X, signifient ἄντροπθς σόζων ἀγιῶ ξυλῶ, qui signifie « sauvant les hommes par le saint bois ».

Dans Macrobe. Saturnalia, livre I, 17 nous avons ce vers :

Κείματι μὲν τ Ἁῒδηυ, Διὰ δέ εἴαρος ἀρχομένοιο,

Ηἔλιον δὲ ἴερειν, μεταπῶρα δλ’ἄβρου Ἰαό.

C’est-à-dire, « Pluton préside sur l’hiver, Jupiter sur le printemps, le Soleil sur l’été, et le beau Jao sur l’automne ». Dans les deux derniers mots ἄβρου Ἰαό (Iao), nous avons une référence à Iao qui représente le dieu Dionysos présidant sur l’automne, la saison des vins et des fruits… Le mot Ἀβρὸς signifie quant à lui beau, majestueux, superbe. Le terme ἀβρὸς, qui est également une épithète du Soleil, serait ainsi la première partie du mot Abrasax ; tandis que la seconde serait constituée du mot Sao, σαω, qui veut dire « sauver » ou « guérir », ou de Sa, σα, signifiant « salut », « santé ». La fonction prophylactique du mot est alors justifiée par son sens de « Le majestueux (Dionysos) qui donne la santé ou le salut ».

Abracadabra

Selon M-A Ouaknin, Abracadabra est né de la confusion entre les deux termes hébreux pour « parole » : dibour et la amira. Abracadabra signifie littéralement, selon lui, « il a créé comme il a parlé » (hou bara kémo chedibère), et c’est donc l’expression de la Cabale chrétienne qui assimile la création par la parole au terme de dibour et non au terme de amira. Car, Dieu crée par l’amira comme il est écrit « vayomèr Elohim » dix fois dans la Genèse. Ce sont les 10 paroles par lesquelles Dieu crée l’Univers.

Cependant, en regardant ce mot de plus près, on pourrait, en l’orthographiant différemment, דברה הברכה, le traduire par « la bénédiction (הברכה) a parlé (דברה) ».

La première apparition de ce mot d’Abracadabra semble dater du 2e siècle après J.-C. dans le De Medicina Praecepta de Quintus Serenus Sammonicus, médecin de l’empereur romain Caracala, qui prescrit à ceux souffrant de fièvres de porter une amulette sur laquelle est inscrit le mot Abracadabra sous la forme d’un cône inversé. Il explique que tandis que le mot se raccourcit, l’emprise du démon ou de l’esprit maléfique sur le patient diminue en proportion :

« Ecrivez sur un morceau de papier ABRACADABRA ; puis répétez ce mot autant de fois qu’il y a de lettres dans le mot, mais en retranchant chaque fois une lettre, de sorte que le tout ait la figure d’un cône. Cela fait, suspendez avec un fil de lin le morceau de papier au cou du malade. On prétend que la graisse de lion est aussi un bon spécifique. Le corail et le safran enveloppés dans une peau de chat ont une vertu non moins merveilleuse. Si vous jugez convenable de suspendre du corail au cou du malade, joignez-y avec confiance des émeraudes: ce talisman chassera infailliblement le feu mortel de la fièvre ».

(De Medicina Praecepta, LII)

La forme même du mot disposé en triangle inversé, chaque ligne ayant une lettre de moins pour terminer par une seule et unique lettre, n’est pas originale dans les écrits mystiques juifs et plus particulièrement dans la Kabbale. Ainsi, nous avons, dans le Sepher Raziel, le mot מאברית, Mabrith, qui apparaît sous la même forme. Selon cet ouvrage, cette incantation permet d’obtenir une réponse à une question : on écrit la question sur du vélin que l’on place sous sa tête pendant le sommeil.

Il est donc probable que « Abracadabra » ne soit que l’expression d’une interprétation occulte de la Cabale chrétienne et non l’expression de la véritable Kabbale, fût-elle pratique. Son étude n’en reste pas moins utile dans pour comprendre l’émergence du mot de la loi de l’Eon d’Horus, dans la cabale thélémite cette fois, Abrahadabra.

ABRAHADABRA (אבראהאדאברא)

Ce mot, qui est est le mot du nouvel Eon de Crowley, apparaît pour la première fois dans le Livre de la Loi, oeuvre majeure du mage Aleister Crowley : « Abrahadabra ; la récompense de Râ-Hoor-Khut » (Liber AL, III, 1) et « La conclusion des mots est le Mot Abrahadabra » (Liber AL, III, 75). Dans le Liber Samekh, Aleister Crowley décrit ce mot comme étant « le Mot de l’Eon qui signifie que le Grand Œuvre est accompli ».

Abrahadabra signifierait « Je bénis les morts », un des trois mots utilisés par les Clavicules de Salomon pour bénir une épée, et qui pourrait dériver de l’hébreu « ha brachah dabarah » ou « Parle la bénédiction » (2).

Comme nous l’avons vu avec Virya, il existe une relation entre Abracadabra et la déité gnostique Abrasax, ou dieu suprême inconnu, source des 365 émanations de la théologie perse. Dans ce contexte, Abrasax est le médiateur entre la création et la divinité. Ce qui rejoint la perception thélémite du mot.

Abrahadabra a une valeur numérique de 418 en guématria classique (1 + 2 + 200 + 1 + 5 + 1 + 4 + 1 + 2 + 200 + 1) ou de 22 (1 + 2 + 2 + 1 + 5 + 1 + 4 + 1 + 2 + 2 + 1) si l’on utilise la Kabbale des Neuf Chambres, Abrahadabrah a alors la même valeur que la lettre Heth épelée en entier (חית) ; Eth Iao (אתיאו), « Essence de IAO » ; et Ra Hoor (ראהוור). 22 renvoie aux 22 Arcanes du Tarot de Thoth, aux 22 Sentiers de l’Arbre de Vie et aux 22 lettres de l’alphabet hébreu. Dans le système crowleyen du Tarot, le Chariot, Arcane VII, est associé à la lettre Heth et donc au mot Abrahadabra par le jeu de la guématria.

Dans les Commentaires du Livre de la Loi, Crowley écrit : « Abrahadabra est le glyphe qui unit le 5 et le 6, la Rose et la Croix. Ainsi le Grand Œuvre, l’équilibre du 5 et du 6, est-il démontré par ce dieu : quintuple en tant qu’Horus Guerrier, sextuple en tant que Ra solaire » et « c’est la clé des rituels car il exprime la formule magique de l’union des idées complémentaires ; et tout particulièrement le 5 du Microcosme avec le 6 du Macrocosme » ; « c’est un symbole de l’établissement du pilier ou phallus du Macrocosme dans le Vide du Microcosme ». Dans son Livre des Mensonges, il ajoute qu’il « représente l’établissement du pilier ou phallus des 5 Aleph. Aleph est un vide ou ktéis, l’Arcane 0 ».

« Vois, mon Fils, l’Économie de cette Voie, vois combien elle s’accorde au Tao, s’accomplissant elle-même entièrement en ta propre Sphère. Et elle est hautement en Accord avec ta propre Volonté sur tous les Plans, afin que chaque Part de ta Nature jouisse de chaque autre Part, se prodiguant des Louanges.

À présent, apprends aussi comment cette Formule est celle du Mot ABRAHADABRA. D’abord, HAD est le Triangle érigé sur des Carrés jumeaux. Sur Hadit je n’ai nul besoin d’écrire car Il s’est dissimulé lui-même dans le « Livre de la Loi ». Cette Substance est le Père, l’Instrument est le Fils & l’Extase Métaphysique est le Saint Esprit dont le Nom est HRILIU. Il y a ensuite le Soleil, Mercure & Vénus dont les lettres sacrées sont ר, ב & ד. Mais la dernière de ces Lettres est ה qui dans le Tarot est l’Étoile dont l’Eïdolon est ד ; & là est cet Arcanum concernant le Tao au sujet duquel j’ai déjà écrit.

Je n’écrirai pas sur ce sujet plus manifestement. Mais prends note de cela, que notre Trinité est notre Voie au sein du Système Solaire & que ה, étant de notre Dame Nuit, l’Étoilée, est une Ancre pour cette Magick qui autrement serait apte à nier notre totalité dans la Relation avec l’Extérieur comme avec l’Intérieur. Mon Fils, pondère ces Mots & tires-en profit ; car j’ai œuvré avec ruse afin de dissimuler ou de révéler selon ton Intelligence, ô mon Fils ! » (3).

418

Nous présentons très brièvement quelques considérations sur le nombre 418, associé à Abrahadabra, en nous basant sur le Liber LVII de Crowley.

418 חית, Heth, ABRAHADABRA, le Grand Mot Magique, le Mot de l’Éon. Notez les 11 lettres, 5 א identiques et 6 autres lettres. Ainsi, il entrelace le Pentagramme et l’Hexagramme. בית הא, la Maison de Hé, le Pentagramme ; voir Idra Zuta Qadisha, 694. « Car ה forme כ, mais ח a formé יוד ».

Notez que 4+1+8=13, le 4 réduit à 1 par le 8, la force rédemptrice ; et 418 équivaut à ח qui équivaut à 8.

Il signifie par permutation « Abraha Deber », la Voix du Chef Prophète (Abraha=Abraham). Il se résout dans le Pentagramme et dans l’Hexagramme comme suit :

En séparant le Un (א) du Multiple (les diverses lettres) :

En prenant chaque lettre en alternance :

הדר par le Yetsirah donne Horus, Isis (Vénus à qui l’on associe la lettre ד), Osiris (Ra, le soleil auquel on associe la lettre ר), à nouveau Père, Mère, Fils. Cet Hexagramme est encore la Triade Humaine.

En divisant en 3 et 8, nous obtenons un Triangle d’Horus dominant le Dragon Courbé aux 8 Têtes, les Supernels crevant la Tête de Daath.

Les cinq lettres utilisées dans ce mot sont א, la Couronne ; ב, la Baguette ; ד, la Coupe ; ה, l’Épée ; ר, la Rose+Croix ; et elles se réfèrent en outre à Amon le Père, Thoth Son Messager et à Isis, Horus, Osiris, la triade divine.

Double Puissance

En tant que symbole de double puissance ou d’unité du Pentagramme et de l’Hexagramme, Abrahadabra symbolise le « mariage mystique » du microcosme et du macrocosme, du monde intérieur et du monde extérieur.

On peut donc dire que Abrahadabra est le mot sacré invoquant l’union des mondes inférieurs et supérieurs au sein de l’étudiant. Utilisé correctement, ce mot a donc le pouvoir d’élever l’étudiant vers des sphères plus hautes de l’initiation. On retrouve d’ailleurs cette idée dans le Rituel Mineur du Pentagramme, au sein duquel les forces des éléments et des planètes sont combinées et équilibrées.

Médiateur

Selon Stavish, « en tant que médiateur, Abrahadabra suggère que puisque l’humanité est une Divinité incarnée, “Il n’y a pas d’autre Dieu que l’homme, et l’Homme est le Fils de Dieu, Dieu est Homme”, nous pouvons expérimenter cet état selon des étapes progressives ou selon des degrés d’expansion de la conscience. Nous pouvons être divin, mais le fossé entre la conscience mondaine du monde terrestre et la conscience cosmique de Kether est radical. C’est pourquoi nous progressons lentement et avec l’aide de différents médiateurs afin de nous assister. »

Parmi ces médiateurs nous pouvons trouver les rituels, les symboles, l’alchimie spirituelle ou encore des maîtres spirituels ou des assistants invisibles venant de l’autre côté de la réalité. Abrahadabra symbolise l’harmonisation des mondes intérieurs et extérieurs au sein de Tiphereth. Au travers de la prière et de la méditation, nous détruisons peu à peu cette barrière jusqu’à atteindre un jour la conscience et l’éveil de l’union des contraires et des dissemblables.

À cette fin, nous pouvons utiliser ce mot, Abrahadabra, comme mantra, en le vibrant comme un mot sacré chargé de puissance, nous pouvons replacer son énergie dans sa puissance originelle, comme expression divine. Lorsque nous vibrons ce mot, nous devons ressentir et imaginer que les mondes inférieurs et supérieurs sont unis en nous, que nous sommes le centre du monde et de l’univers, expression de Tiphereth…

Mais écoutons à nouveau Stavich : « Dans la Chaîne d’Or d’Homère, nous voyons le même message exposé selon une symbolisme quasi identique. Le symbolisme essentiel du texte est centré autour d’un Ouroboros. Il consiste en deux dragons se combattant, chacun mordant la queue de l’autre, l’un avec des ailes et l’autre sans. Entre eux est une Étoile de David avec des symboles planétaires et élémentaux en différents points. De plus, placés au centre il y a les trois principes de l’Alchimie – le Soufre, le Sel et le Mercure.

« Chaque fois qu’un Dragon rencontre un ennemi, ils se battent ».

Le Volatile doit devenir fixe, la Vapeur et le triangle aqueux doit devenir le triangle de la terre, le triangle du feu doit devenir corporel, ou aucune vie ne pourrait entrer dans le triangle de la terre. Le Supérieur doit devenir Intérieur et vice versa.

Le Dragon avec les ailes tue le Dragon sans aile et il le détruit. Ainsi sont manifestées la Quintessence et la Puissance.

Le Dragon ailé peut être interprété comme notre Maître intérieur, ou Saint Ange Gardien, et le Dragon sans aile comme notre ego ou « petit roi ». Ils ont besoin l’un de l’autre afin d’exprimer la puissance de la création et son expression au travers des forces planétaires et élémentales. Ce n’est que lorsque le supérieur devient intérieur et que l’intérieur devient le supérieur que nous voyons les éléments retourner à leur source primordiale. En fin de compte, les deux Dragons sont tués l’un par l’autre et leur mort combinée est une union de la plus parfaite expression de la puissance cosmique. »

Plus sur le sujet :

Cet article est la version corrigée et augmentée du texte « Abracadabra et Abrahadabra», par Spartakus FreeMann.

Les noms Magiques Abraxas, Abracadabra et Abrahadabra, Spartakus FreeMann, Zénith de Libertalia, mars 2004 e.v. révision janvier 2010 e.v.

Notes et sources :

(1) L’Encyclopédie, Volume 1, Diderot et d’Alembert.

(2) Marc Stavish, « Abrahadabra, some thoughts on the word ».

(3) Aleister Crowley, Liber CXI vel ALEPH, Γ θ « DE HAC FORMULA CONSIDERATIONES KABBALISTICAE ».

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