Introduction du Temple de Satan par Stanislas de Guaita.
PremiĂšre Septaine du Serpent de la GenĂšse : Le Temple de Satan.
Introduction
Ă lâheure oĂč nous traçons ces lignes, le monde intellectuel est en plein dĂ©sarroi. Le triomphe de la pire Ă©pidĂ©mie â lâAgnosticisme â se laisse augurer par trois symptĂŽmes alarmants entre tous : le dĂ©lire de lâirrespect, la monomanie du relatif et la fiĂšvre de lâindividualisme.
Si, pieux à recueillir les enseignements du passé, comme un fils accomplit les derniÚres volontés de son pÚre, le Docteur moderne interrogeait avec déférence le testament des sages primitifs ;
Si le Savant, sans nĂ©gliger lâĂ©tude patiente des faits accomplis, ni suspendre la grande enquĂȘte analytique, veillait au triage progressif de tant dâĂ©lĂ©ments Ă©pars, en vue dâĂ©difier une synthĂšse universelle oĂč se rangeassent, en quatre hiĂ©rarchies Ă©tagĂ©es, les sciences physiques, morales, intellectuelles et divines ;
Si le Penseur, enfin, moins soucieux de paraĂźtre original que sincĂšre et vĂ©ridique se montrait aussi moins prompt Ă rĂ©cuser toute autoritĂ© traditionnelle, quâĂ sâenquĂ©rir avec loyautĂ© des principes Ă©ternellement absolus, quâils aient Ă©tĂ© formulĂ©s ou non par un autre que lui ;
Si tels étaient théologiens, savants et philosophes, alors le xixe siÚcle serait en vérité le siÚcle-lumiÚre et Paris la ville-soleil.
Mais non. â A part les minutieux investigateurs du positivisme, qui entassent, infatigablement et sans conclure, sur des Ossas de menues constatations, des Pelions de remarques scrupuleuses ; â Ă part les dĂ©vots, mais aveugles partisans de la lettre qui tue, dragons de la sainte caverne et dont le seul mĂ©rite est de conserver intact le trĂ©sor symbolique du dogme, Ă jamais fermĂ© pour eux : que dire de ceux-lĂ que tient encore le souci des vues dâensemble ?
Comme leur ambition se borne Ă estampiller de leur nom un systĂšme dâailleurs quelconque â mais qui paraisse bien Ă eux â ils contestent a priori ta doctrine de leurs devanciers et poussent lâĂ©mulation entre collĂšgues jusquâaux plus mesquins dĂ©nigrements. Nul ne veut ĂȘtre le dernier Ă dĂ©noncer son voisin, comme envisageant les choses dâun point de vue inexact, erronĂ©, trompeur… Comme si le rĂŽle de ta synthĂšse nâĂ©tait pas dâembrasser tous les points de vue relatifs, dans une mĂȘme et absolue contemplation du vrai ! Câest la Haute Science, que celle-lĂ , et Spinosa lâa magnifiquement dĂ©finie, en disant quâelle envisage les objets sous un caractĂšre dâĂ©ternitĂ©.
NĂ©anmoins, quelque dĂ©sespĂ©rĂ©e que puisse paraĂźtre Ă cette heure la cause sainte de lâIntĂ©grale VĂ©ritĂ©, il est loisible Ă lâobservateur attentif de percevoir, Ă cĂŽtĂ© des symptĂŽmes de dĂ©composition et de mort, dâautres indices non moins certains de restauration et de renaissance. Toutes ces choses sont providentielles. Des scories se dĂ©gage au creuset le noble mĂ©tal et le monde nouveau, dans son Ćuvre de laborieuse rĂ©Ă©dification, utilisera les infimes dĂ©bris du vieux monde, dissociĂ©, dĂ©sorganisĂ© fort Ă point, pour fournir des matĂ©riaux tout prĂȘts aux architectes de lâavenir.
Ainsi, le Futur sâalimente du PassĂ© ; ainsi notre MĂšre CĂ©leste fait germer et fleurir la vie incorruptible sur le fumier de la mort – terreau fertile et quâengraisse lâuniverselle voirie des existences Ă©phĂ©mĂšres, accumulĂ©es- de jour en jour.
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