L’Ăglise Gnostique par JohannĂšs (Joanny Bricaud).
LâĂglise gnostique est une Ăglise ayant pour but essentiel de faire :
- LâUnitĂ©, par la raison et la science moderne, entre toutes les Ăglises chrĂ©tiennes et entre les divers systĂšmes philosophiques ;
- lâUnitĂ© du Christianisme depuis JĂ©sus-Christ et du Christianisme avant JĂ©sus-Christ, et mĂ©riter par lĂ dâĂȘtre vĂ©ritablement universelle.
Sa doctrine est la Gnose, cette philosophie religieuse traditionnelle qui, dans lâantiquitĂ© jusquâau Ve siĂšcle de notre Ăšre, resta secrĂšte, câest-Ă -dire fut enseignĂ©e seulement Ă quelques auditeurs dâĂ©lite. AprĂšs la mort de JĂ©sus, cette doctrine prit le nom de chrĂ©tienne. En effet, plusieurs PĂšres de lâĂglise, tels que ClĂ©ment dâAlexandrie, OrigĂšne, appelaient leur doctrine Gnose.
Mais il sâĂ©tablit alors un double courant : ceux qui ne voulaient trouver les antĂ©cĂ©dents de la doctrine chrĂ©tienne que dans la Bible hĂ©braĂŻque et ceux qui reconnaissaient les antĂ©cĂ©dents du Christianisme dans les traditions des divers peuples.
Les premiers abandonnÚrent la dénomination de gnostiques pour se désigner uniquement sous le nom de chrétiens et les seconds conservÚrent le nom de gnostiques.
Dans la suite, le courant chrĂ©tien, grĂące Ă son alliance avec les princes de ce monde, triompha du courant gnostique. Une Ă une sâĂ©teignirent les lumineuses clartĂ©s quâavait projetĂ©es le gnosticisme. Ce fut la longue nuit du moyen-Ăąge oĂč Rome seule vĂ©cut et sâorganisa pour la conquĂȘte future du monde.
Les gnostiques durent se cacher, se rĂ©unir en secret, jusquâen 1208, Ă©poque Ă laquelle le patriarche gnostique Guilhabert de Castres rĂ©unit les Ă©vĂȘques gnostiques en un concile Ă MontsĂ©gur, oĂč furent fixĂ©s les dĂ©tails de la liturgie et les principaux points de la doctrine gnostique Albigeoise.
Lâantique gnosticisme se dressait Ă nouveau en face de lâĂ©glise romaine. Celle-ci sâĂ©mut. Elle envoya des missionnaires Ă ces hĂ©rĂ©tiques pour essayer de les ramener Ă elle par la persuasion. Mais ses efforts furent vains. Alors, elle dĂ©chaĂźna lâInquisition.
Lutte longue, acharnée, épouvantable, atroce, dans laquelle les Albigeois furent dispersés, traqués, pendus, brûlés.
On croyait quâil ne restait rien dâeux, Erreur ! Les Templiers hĂ©ritĂšrent de leur doctrine et en firent leur religion.
Mais le gnosticisme christianisĂ© triompha du gnosticisme pur, et lâEglise Romaine anĂ©antissait les Templiers [1] au commencement du XIVe siĂšcle en mĂȘme temps que le concile de Vienne condamnait leur doctrine.
Le gnosticisme ne disparut pas pour cela. Il fut conservĂ© par la sociĂ©tĂ© des Rosicruciens, laquelle se consacra Ă lâĂ©tude de lâalchimie et Ă la propagation des doctrines gnostiques et dont les descendants sâalliĂšrent le 24 juin 1717 avec la « FraternitĂ© des Libres-maçons » pour fonder la Franc-Maçonnerie.
Le gnosticisme fut dÚs lors la doctrine secrÚte de la Franc-Maçonnerie [2].
Aujourdâhui, des maçons instruits et des spiritualistes initiĂ©s, armĂ©s en outre des dĂ©couvertes de la science moderne, veulent reconstituer le gnosticisme intĂ©gral en lâappuyant sur la tradition universelle et les sciences dâobservation, par le moyen de lâĂglise Gnostique.
Cette Ăglise est large et tolĂ©rante. Ses dogmes ne se prĂ©sentent pas comme objets de dĂ©monstration philosophique et scientifique, car elle est non la Foi, mais la Science : GnĂŽsis ! Son premier Patriarche a Ă©tĂ© Jules Doinel, un des hauts dignitaires de la Maçonnerie, en religion Valentin, qui rĂ©tablit la hiĂ©rarchie gnostique en 1890 et choisit comme siĂšge primatial MontsĂ©gur en souvenir de la sainte Montagne sur laquelle deux cents martyrs furent brĂ»lĂ©s en 1244 par le vouloir satanique de lâInquisition.
Les adhĂ©sions vinrent nombreuses. LâĂglise Romaine sâalarma. Un rapport spĂ©cial fut adressĂ© au Saint-Office, et Valentin, ainsi que les autres Ă©vĂȘques gnostiques qui avaient Ă©tĂ© consacrĂ©s selon le rite chrĂ©tien primitif par deux prĂȘtres romains, furent trois fois excommuniĂ©s, comme Ă©vĂȘques hĂ©rĂ©siarques, schismatiques et ennemis de lâĂglise.
En novembre 1894, Valentin fit dĂ©fection [3]. SynĂ©sius [4], consacrĂ© Ă©vĂȘque de Bordeaux le 8 juillet 1894, fut Ă©lu Patriarche gnostique, Primat dâAlbigeois, Grand MaĂźtre de lâOrdre de la Colombe du Paraclet, Ă la place de Valentin» dĂ©missionnaire. Il est aidĂ© dans lâadministration de lâĂ©glise par des Ă©vĂȘques, des diacres et des diaconnesses. LâĂglise Gnostique a voulu ainsi que la religion consacrĂąt lâĂ©galitĂ© de lâhomme et de la femme, en accordant Ă celle-ci, aussi bien quâĂ lâhomme, le pouvoir sacerdotal.
Une diffĂ©rence qui distingue les Ă©vĂȘques gnostiques des romanistes est que ceux-lĂ sont considĂ©rĂ©s comme des ministres chargĂ©s de diriger lâinstruction des membres de lâĂglise et nullement comme des reprĂ©sentants de Dieu sur la terre ainsi que lâenseigne lâĂglise romaine.
Une seconde diffĂ©rence est quâaucune fonction sacerdotale nâest rĂ©tribuĂ©e.
Pour les romanistes, le sacerdoce est une profession qui rapporte un revenu, revenu fourni par lâĂ©glise ou les gouvernements.
Jamais les gnostiques nâont pensĂ© que le sacerdoce fĂ»t une profession et un moyen de gagner sa vie. Les Ă©vĂȘques et diacres gnostiques remplissent leurs fonctions sacerdotales et gagnent leur vie au moyen dâune profession libĂ©rale ou dâun mĂ©tier.
En France, les siÚges épiscopaux occupés sont au nombre de sept : Paris, Versailles, Toulouse, Lyon, Carcassonne, Nancy et Albi.
LâĂglise Gnostique est reprĂ©sentĂ©e Ă lâĂ©tranger par des Ă©vĂȘques : en Belgique, Prusse, BohĂȘme, Autriche, Russie, Italie, RĂ©publique Argentine et Canada. Dans plusieurs de ces pays, elle compte de nombreux adhĂ©rents.
LâassemblĂ©e des ĂvĂȘques forme le Haut Synode Gnostique qui a Ă©tĂ© reconstituĂ© dĂ©finitivement au Concile tenu Ă Toulouse au mois dâaoĂ»t 1903.
Ce concile a dĂ©crĂ©tĂ© que le Gnosticisme ne prĂ©tend sâimposer aux consciences ni par la force du pouvoir civil ou militaire, ni par de vaines menaces de chĂątiments dâoutre-tombe ni par de fallacieuses promesses de rĂ©compenses futures. BasĂ© sur la tradition universelle et sur la philosophie et la science moderne, il ne sâadresse quâĂ la raison. Il admet la libertĂ© absolue de conscience et dâexamen chez tous les hommes et les traite tous en frĂšres.
Loin de combattre la civilisation moderne comme le fait lâĂglise romaine, lâĂglise gnostique admet les gouvernements quâil plaĂźt aux peuples de se donner, et, respectueuse des lois civiles, elle reconnaĂźt le divorce, dans les limites fixĂ©es par ces lois. Car, chez elle, il nâexiste pas de sacrement de mariage.
LâĂglise Gnostique nâest pas une Ă©glise publique, ouvrant les portes de ses assemblĂ©es au premier venu. Ne visant pas au nombre des membres, mais Ă leur qualitĂ©, elle constitue une Ă©glise Ă©sotĂ©rique, fermĂ©e, oĂč lâon nâest admis que par initiation, câest-Ă -dire que la doctrine et la pratique gnostiques ne sâenseignent que progressivement, avec des temps dâarrĂȘt, qui permettent Ă lâInitiĂ© de bien sâassimiler la doctrine et de sâexercer Ă la pratiquer. [5]
LâĂglise Gnostique recommande Ă ses adeptes la propagande par la parole, les Ă©crits et lâexemple en rĂ©pandant la Gnose, câest-Ă -dire une religion qui ne soit plus en contradiction avec la science, mais qui, au contraire, cherche Ă faire lâunion avec la science.
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La jalousie et la haine des inquisiteurs les poursuivant Ă outrance, ils auraient peut-ĂȘtre fini par succomber totalement et leur philosophie par disparaĂźtre avec lâanĂ©antissement des Templiers sâil ne sâĂ©tait trouvĂ© un homme qui avait successivement parcouru la Turquie, la Palestine, lâArabie, tout lâOrient, remontant ainsi aux sources de la tradition Ă©sotĂ©rique, pour opposer la Gnose, par le moyen dâune sociĂ©tĂ© mystĂ©rieuse, Ă lâignorance et au fanatisme de lâĂglise Romaine.
Cet homme nous est connu sous le nom de Chrétien Rosencreuz, fondateur de la Société alchimique des Rosicruciens.
Le nom de Rosicrucien venait de lâemblĂšme adoptĂ© par la SociĂ©tĂ© : une rose sur une croix symbolisant philosophiquement lâunion de la science et de la foi, et gnostiquement le salut, non par la foi, mais par la science !
Les membres de cette sociĂ©tĂ© se consacraient Ă lâĂ©tude de lâalchimie [6] et Ă la propagation de la Gnose. Dâabord peu nombreux, leur nombre sâĂ©tait accru successivement, Ă tel point quâau commencement du 18e siĂšcle ils Ă©taient fort estimĂ©s en Angleterre surtout, oĂč ils jouissaient dâune influence des plus considĂ©rables.
Plus sur le sujet :
L’Eglise Gnostique par JohannĂšs (Joanny Bricaud).Â
In RenĂ© SchwaeblĂ©, Le sataniste flagellĂ©. H. Daragon, 1912 (p. 10-22). L’Eglise gnostique moderne.
- Câest Philippe-le-Bel, on le sait, qui fit brĂ»ler les Templiers. DâoĂč ce nom que les sorciers hurlent au sabbat : « Ah ! Philippe ! Philippe ! » (N. D. L. A.)
- Selon nous, ces deux sociĂ©tĂ©s nâen ont toujours fait quâune, Le portail gauche de Notre-Dame est typique : la Vierge y tient une croix avec une rose en son centre. Les Compagnons maçons qui Ă©levĂšrent la cathĂ©drale signĂšrent ainsi leur Ćuvre. (N. D. L. A.)
- Valentin, aprĂšs avoir regrettĂ© sa dĂ©fection et ĂȘtre rentrĂ© dans le giron de notre Ăglise, est mort en 1901, Ă©vĂȘque de Carcassonne sous le nom de T. Jules. H est lâauteur de lâHymnarium Gnosticum.
- Il sâagit de M. Fabre des Essarts (N. D. L. A.).
- Cette initiation se donne en trente-trois grades analogues aux grades maçonniques. Comme la franc-maçonnerie, notre sociĂ©tĂ© gnostique est une sociĂ©tĂ© fermĂ©e, dans laquelle on nâest reçu quâĂ certaines conditions. Ces conditions ont Ă©tĂ© fixĂ©es dans la constitution et les rĂšglements gĂ©nĂ©raux de lâĂglise gnostique qui ont Ă©tĂ© votĂ©s par le concile de Toulouse de 1903. Jâajoute que comme la franc-maçonnerie, la sociĂ©tĂ© gnostique est une sociĂ©tĂ© de secours mutuels, et quâĂ ce point de vue elle peut rendre Ă ses adeptes de trĂšs grands services dans la vie pratique. Toute personne de lâun et de lâautre sexe ĂągĂ©e de 21 ans pouvant ĂȘtre reçue dans le Gnosticisme, on doit adresser les demandes dâinitiation Ă M. le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de lâĂglise gnostique, rue Pestalozzi, 3, Paris.
- Nous qui nous vantons dâavoir passablement Ă©tudiĂ© lâAlchimie (Biologie minĂ©rale, ProblĂšme du Mal, Revue rose, etc.) pouvons affirmer nâavoir rien trouvĂ© dâintĂ©ressant dans les manuscrits dits rosi-cruciens, ni rien dĂ©montrant que les Rosi-Cruciens se soient plus spĂ©cialement occupĂ©s dâalchimie. (N. D. L. A.)